Comment annuler son PGE ?
Yves Laisné
Le premier 5 avril 2024
Quels sont les critères d'invalidité des contrats ?

Pour annuler un contrat, il faut que celui-ci soit, pour une raison ou pour une autre, invalide.
Par exemple, un des signataires du contrat n’aura pas la capacité de le signer, ou bien le consentement d’un des signataires sera affecté par un vice du consentement, par exemple erreur sur la substance, dol principal, ou violence.
Un contrat peut aussi être annulé si les termes n'étaient pas clairement définis ou compris par toutes les parties, ce qui peut mener à une annulation pour ambiguïté ou malentendu significatif. Si, par exemple, les termes utilisés sont trop vagues ou si une erreur matérielle a été commise lors de la rédaction, les tribunaux peuvent juger que le contrat n'est pas valide, car il ne reflète pas une entente réelle et éclairée entre les parties.
Quelles spécificités de l'annulation d'un PGE ?
Dans le cas du PGE, hormis des situations très particulières, il sera difficile de faire juger que le signataire emprunteur, c’est-à-dire l’entreprise, n’avait pas la capacité de le signer ou que son consentement a été vicié par erreur, dol principal ou violence.
En effet, les entreprises concernées disposent généralement des compétences et des conseils nécessaires pour comprendre les termes du prêt. Les banques mettent également en place des procédures rigoureuses pour vérifier la capacité et le consentement des emprunteurs, réduisant ainsi les chances que ces aspects soient contestés avec succès devant les tribunaux.
Le TUP, peut vous aider dans ces demarches. La transmission universelle de patrimoine implique que tous les actifs et passifs de la société absorbée sont transférés à la société absorbante, qui est la maison-mère détenant 100 % des parts et réalisant l'opération.
Nature et justification du PGE
En revanche, la question pourra se poser de la nature véritable du PGE.
Comme son nom l’indique, le PGE est un « prêt garanti par l’État », accordé par une banque à une entreprise.
Il n’existe aucune raison, politique, économique, juridique ou morale pour que l’État, c’est-à-dire la collectivité nationale, garantissent un prêt accordé par une banque à une entreprise, c’est-à-dire un contrat entre deux personnes juridiques privées.
La raison profonde de cette intervention, parfaitement inhabituelle, de l’État, tient dans les circonstances exceptionnelles correspondant aux mesures sanitaires prises pour la lutte contre la pandémie dite « COVID 19 ».
Cependant, la légitimité de l'intervention de l'État dans les PGE pourrait être questionnée en termes de favoritisme potentiel ou d'atteinte à la libre concurrence. Les critiques pourraient argumenter que cette garantie étatique distord le marché en favorisant certaines entreprises au détriment d'autres qui ne bénéficient pas de telles mesures. Ainsi, bien que justifiée par une urgence sanitaire, cette intervention suscite un débat sur son équilibre entre nécessité immédiate et implications à long terme pour l'économie et la société.
Quel impact des mesures sanitaires sur les entreprises ?
La nature de ces mesures sanitaires et celle de mesures régaliennes, prise d’autorité, peu importe que ce soit dans l’intérêt général. Ces mesures régaliennes ont eu, sur les entreprises, un impact très différencié :
– certaines entreprises ont été menacées purement et simplement de ruines par les mesures de fermeture administrative ordonnée : c’est le cas pour les activités de café hôtel restaurant, d’événementiel, de salle de sport, de cabaret, dancing, discothèques, bars ;
– d’autres entreprises ont été impactées sans risquer d’être ruiné, comme par exemple certains commerces de détail ;
• d’autres encore ont tiré leur épingle du jeu, comme les entreprises de transport de proximité, la grande distribution et les commerces alimentaires,
• d’autres enfin ont réalisé dans ce contexte des profits insolents comme, notamment, les entreprises d’e-business, ainsi que la pharmacie et la parapharmacie.
Cette variabilité de l'impact illustre comment des événements extérieurs comme une pandémie peuvent rapidement transformer le paysage économique. Les mesures de fermeture ont causé des pertes de revenus dévastatrices pour les industries dépendant de la présence physique des clients, telles que l'hôtellerie, la restauration, et le divertissement, exacerbant leur vulnérabilité économique. Parallèlement, des secteurs comme le e-commerce ou les pharmacies ont bénéficié d'une hausse soudaine de la demande, profitant des nouvelles habitudes de consommation et des nécessités sanitaires accrues. Cette disparité met en lumière les défis associés à la mise en place de mesures de soutien gouvernementales, soulevant des questions sur leur équité et leur capacité à distribuer l'aide de manière équilibrée parmi les divers secteurs économiques.
Question de l'équité et des compensations
De ce constat, il ressort clairement que dans le monde de l’entreprise, l’égalité des citoyens devant les charges publiques a été rompue. Comme dans tous les cas de ce genre il importe que cette égalité devant les charges publiques soit rétablie par l’allocation aux victimes d’indemnisation spéciale.
Ainsi, il devient impératif de concevoir des mécanismes de compensation qui reflètent non seulement les pertes subies, mais aussi le degré de désavantage causé par les politiques gouvernementales. Cette démarche de réparation viserait à soutenir équitablement les secteurs les plus touchés, tout en reconnaissant les avantages accidentels reçus par d'autres. En mettant en œuvre des politiques bien ciblées, le gouvernement peut œuvrer à restaurer la confiance et à maintenir l'intégrité de l'équilibre économique et social.
Quel est le caractère indemnitaire du PGE ?
C’est le cas dans l’hypothèse de dommages de guerre et ce n’est sans doute pas un hasard si le président de la République, chef de l’État, dans son célèbre discours du 20 mars 2020, à parler, à propos de la pandémie, d’état de guerre.
La vraie raison de l’intervention de l’État dans les PGE apparaît donc plus clairement : il s’agit d’indemniser les entreprises victimes des mesures sanitaires afin de rétablir l’égalité des citoyens devant les charges publiques.
Mais si le PGE a une nature indemnitaire, peut-il encore être un prêt ? C’est la vraie question qui se pose à ceux qui souhaiteraient s’affranchir de la charge qu’il représente.
Si le PGE représente la compensation d’une perte causée par une mesure autoritaire d’intérêt général, il a la nature d’une réparation et une réparation ne se rembourse pas.
Dans ce contexte, les débats juridiques et économiques se concentrent sur la définition et les implications du PGE en tant qu'indemnité. Si la nature réparatrice du PGE est reconnue, cela pourrait justifier que les obligations de remboursement du PGE soient annulées ou ajustées, soulageant ainsi les entreprises qui ont subi des pertes importantes en raison de directives gouvernementales. Cette approche pourrait reconfigurer les relations entre l'État et les secteurs économiques affectés, en offrant une base légale pour des allègements financiers ciblés. La question demeure ouverte quant à la façon dont les tribunaux et les décideurs politiques interpréteront ces arguments, et quelles seront les répercussions pour les entreprises concernées.
Stratégie de défense pour les entreprises
C’est l’axe de défense que nous proposons aux entreprises en difficulté pour rembourser leurs PGE : faire plaider que la nature réelle du PGE est indemnitaire et qu’en conséquence il n’a pas lieu d’être remboursé.
Sans doute sera-t-il pas très aisé de faire triompher cette analyse en jurisprudence.
Et il sera facile de nous opposer que l’entreprise a largement le temps de déposer son bilan avant qu’une décision favorable soit prise à son profit.
Toutefois, cette stratégie nécessite une préparation minutieuse et une argumentation solide pour convaincre les tribunaux du caractère exceptionnel du PGE. Les entreprises doivent rassembler des preuves substantielles démontrant comment les mesures gouvernementales ont impacté spécifiquement leurs opérations. De plus, il est crucial de souligner la disproportion des effets des mesures entre différents secteurs, renforçant ainsi l'argument que le PGE devrait être vu comme une aide compensatoire plutôt qu'un prêt traditionnel. Cette approche pourrait potentiellement influencer non seulement la jurisprudence future, mais aussi les politiques publiques concernant les aides en temps de crise.
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